La Zaouïa de Kerzaz, depuis sa fondation, est un pôle qui éclaire par le savoir qu’elle dispense la zone s’étendant de l’Oued Saoura dans le Sud aux lointaines contrées de Mécheria et El Bayadh dans les Hauts-Plateaux. Aussi, elle n’a jamais cessé de pourvoir ces régions là de «talebs» enseignant le Livre Saint et d’Imams dirigeant les prières dans les mosquées. Chaque année, les «Hmyans» effectuent un long voyage pour assister à la waâda de Kerzaz qui se tient à la Zaouïa où se trouve la sépulture de Sidi Ahmed Ben Moussa.
Dans un manuscrit du Cheïkh Mohammed Mustapha Erregadi Elkounti Touati, et selon Sidi Mohamed Ben Lekbir, Cheïkh de la Zaouïa de Kerzaz décédé en 1988, Sidi Ahmed est le fils de Moussa Ben Khélifa Ben Moussa Ben Abdallah Ben Abderrahman Ben Ahmed Ben Abdessalam Ben Méchiche Ben Abi Bakr Ben Ali Ben Horma Ben Sellam Ben Aïssa Ben Mezouar Ben Ali Haïdara Ben Mohammed Ben Idris Ben Abdallah l’kamel Ben l’Hassan Elmoutana Ben l’Hassan L’bast Ben Ali Ben Abi Taleb et de Fatima Zohra , fille du prophète QSSSL.
Le Cheïkh est né à Fès, selon Sidi Mohammed Ben Djafar Elkettani Elfassi qui le confirme dans son ouvrage intitulé «Kitab el iîtizaz bimanakib echourafa Al Kerzaz», ouvrage qui informe sur les cheïkhs et ceux qui avaient pris leur succession du temps de Sidi Ahmed Ben Moussa à la fin du XIIIe siècle de l’Hégire.
L’auteur ne cite point la date exacte de la naissance du fondateur de la Zaouïa de Kerzaz mais se contente de dire que c’est vers la fin du IXe siècle de l’Hégire. Feu Boufeldja Ben Mohammed Bouhassoun, lui, avance que c’est en 897 de l’Hégire.
Son père Sidi Moussa Ben khélifa a quitté la terre de ses ancêtres située à djebel Ulm pour se fixer à Fès où il s’est marié avec une femme de la tribu des Béni Aâmed répondant aux noms d’Aïcha Bent Sidi Abdallah El Eulmi. De cette union naquit Sidi Ahmed Ben Moussa.
La même source indique que Sidi Moussa partit pour se fixer à Douar Ouled Moussa sur la rive de l’Oued Saoura laissant derrière lui le jeune enfant à Fès. Ce dernier ne rejoignit ce lieu que 40 ans plus tard et à la demande pressante de son père. Il débuta son enseignement à Fès et eut pour premier maître Sidi Mohammed Ben Abi Djemaâ Essoumati Meknassi et le fassi connu sous le nom d’Elhibti. L’auteur de «Dawhat ennacher» cite l’imam Sidi Mohammed Ben Ahmed Ben Ali Ben Ghazi Elmeknassi et Abou Abbas Sidi Ahmed Ben Fassi Ghessani, connu sous le nom de Kaddoumi qui lui enseigna l’interprétation du Coran, le Fikh et la grammaire. C’est au contact de ces célébrités en leur temps que grandit Sidi Ahmed Ben Moussa. Il succéda à son maître Ben Ghazi et devint Mufti à fez. Il se déplaça ensuite vers l’autre pôle qu’était Miliana en Algérie pour suivre les cours dispensés par Sidi Ahmed Ben Youcef El Méliani Errachidi dont sept disciples surnommés «El Madhabih», les égorgés. Il se déplaça ensuite vers Sijilmassa où il descendit chez le Cheïkh Sidi Mohammed Ben Abderrahman Essahli, maître en son temps, qui approfondit ses connaissances avant de l’orienter vers Sidi Ahmed Laroussi à Séguia El Hamra, ami de Sidi Rahal El Boudali et revint à Fès à l’âge de 31 ans où il enseigna dans la grade mosquée. Sa renommée s’étendit alors dans tout le royaume et fut l’objet de sollicitations de toute part. A la demande pressante de son père, il descendit vers l’Oued Saoura où il s’attela à fonder sa propre Zaouïa connue sous le nom actuel de Zaouïa elkbira. Il fit bénéficier ses disciples du savoir amassé durant ses longues pérégrinations de 40 ans.
Sentant sa mort prochaine, il fit venir ses disciples et chargea l’un d’eux Sidi M’hamed Ben Brahim Elbadaoui de s’occuper de son ablution mortuaire et avant l’aube du 27e jour de Rabiî El Awal 1013 de l’Hégire correspondant à 1604, il rendit l’âme à l’âge de 116 ans.
Parmi ses œuvres, on dénombre «Ettawhid fi maârifati El Wahid», «El Borhan fi Ahkam El Coran», «Inarat ettarik wa massalik ahl tahkik» et une thèse dite «Elmoussaouia fi kawaïd ellougha el arabia» et un recueil des dits des méjdoubs dans le melhoun et des «Dhikrs» comme «Hizb el falah» qui se récite après les prières obligatoires soit 100 fois sourate El Fatiha après la prière du Sobh et d’El îcha et 80 fois le salut sur le Prophète, QSSSL, après la prière du Asr du vendredi et la Hadra ou ce qu’on appelle les «Roumouz» et le «ward» qu’on récite en égrenant le chapelet connu sous l’appellation de «Tarika Moussaouia». Parmi les cheïkhs qu’il a formés, on cite Sidi M’hammed Ben Jrad saouri qui lui succéda à sa mort à la tête de la Zaouïa lékbira, Sidi Abderrahmane Ben Ahmed l’Hamzaoui l’guebaoui, Sidi M’hamed Ben Oumer l’badaoui, Sidi Ahmed el Hadad, Sidi Abdallah Sibaî et Sidi Ahmed Ben Aïssa entre autres.
A la mort de Sidi Ahmed Ben Moussa, ce fut son élève Sidi Ahmed Ben Jrad qui s’occupa de la direction des affaires de la Zaouïa et de l’enseignement et de l’éducation des demandeurs du savoir venus de toute part. A sa mort, la succession revint à Sidi Abderrahman Ben Ahmed l’hamzaoui et ce jusqu’à la venue de Sidi Abderrahman Ben Ahmed Ben Moussa, dit Aboufeldja, petit fils du cheïkh fondateur. Il se déplaça au lieu dit actuellement Kerzaz et fit construire une nouvelle Zaouïa et «Dar El Beïda» et acheta des biens immobiliers qu’il mit sous le «Habous». Depuis lors, ce lieu de savoir est devenu un pôle de savoir pour les étudiants et une visite incontournable pour les tribus «hmyanes» qui, chaque année, viennent de Mécheria, chargés d’offrandes destinées à offrir le gîte et le manger aux futurs Talebs et Imams. Autre particularité de la région que certains attribuent à la bénédiction du Cheïkh, il existe à Kerzaz une variété de dattes portant justement le nom de cheïkh qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Elles ont la couleur et la forme de figues noires et un goût plus savoureux que les autres dattes. Un émir arabe, en visite dans la région, tomba sous le charme de ces fruits qu’il ne s’empêcha pas d’affréter un avion spécial pour lui transporter une soixantaine de jeunes plants de ce genre.
Source: M. Ahmed, La Voix de L'Oranie.